L’automobile accompagne nos vies et s’associe logiquement à nos fêtes. Ce constat m’a inspiré cette chronique à l’heure du 1er avril.
Le 1er avril fait partie de mes fêtes préférées. Pourquoi ? Parce qu’il célèbre l’humour, l’imagination, la construction de sketchs et fictions destinés à transporter des auditeurs ou lecteurs dans un monde parallèle plaisant. Je l’ai longtemps marqué par la mise en ligne de fictions automobiles que j‘ai pris beaucoup de plaisir à rédiger.

Servia-Sabater – Opel-Manta-400 – 1984 – Rallye-Monte-Carlo – Photo-Thierry-Le-Bras
Puis j’ai arrêté pour l’instant d’écrire des chroniques mijotées avec un poisson d’avril. Des amis m’ayant confié que chaque 1er avril, ils se connectaient à mon blog pour découvrir ma blague de l’année, je me suis dit que le poisson lecteur ne mordrait plus à l’hameçon du gag mécanique. Mais comment résister au plaisir d’évoquer à cette période des voitures en rapport avec des poissons ? Il en existe plusieurs.
La raie Manta d’Opel
Dans les années 60-70 et au début des années 80, Opel occupe une place intéressante sur le marché. La branche européenne du groupe GM propose des modèles de qualité à des prix inférieurs à Alfa Romeo, BMW, Mercedes. Ceux qui s’intéressaient déjà à l’automobile se rappellent forcément les Olympia, Rekord, Kapitan, Admiral, Commodore, Ascona, Kadett Rallye puis GTE… Sans oublier la Manta !

Opel-Manta-19-SR – 1971 – Photo- Thierry-Le-Bras
Le coupé Manta s’inscrit dans le positionnement de la marque à l’éclair à cette époque. Une voiture de qualité, franchement jolie, avec une gamme de motorisations qui inclut un 1900 cm3 développant 90 cv. Un look de sportive, des couleurs et des finitions attractives, une robustesse à toute épreuve, une habilité permettant d’accueillir une famille. Elle concurrence la Capri produite par Ford, des berlines compactes à vocation sportive, par exemple l’Alfa Romeo Giulia et la BMW 1602. Le nom Manta provient des travaux de l’océanographe Jacques-Yves Cousteau, très populaire, qui avait réalisé de magnifiques clichés de raies Manta dont certains furent exposés lors de la présentation du modèle.

Thierry-Le-Bras – Opel-Manta-19-SR – 1971 – Photo- Théo-Le-Bras
La Manta conserve une place particulière dans mes souvenirs. Mon père en a acheté une quand j’avais seize ans. Il me laissait parfois (assez souvent) la conduire sur des petites routes où les gendarmes ne sévissaient pas. Et j‘étais très fier lorsqu’il me déposait au lycée dans cette voiture jaune moutarde avec capot noir et bandes noires comme les machines engagées en rallye. Car déjà, je ne rêvais que de piloter un jour en course. Pas en professionnel, juste en gentleman driver. J’aimais les études et e peux rapporter sans me vanter avoir été bon élève. Mais parfois le soir, quand je planchais sur une dissertation, un devoir de maths ou que je travaillais mon anglais et mon allemand, je me disais qu’à mon âge, les frères Pedro et Ricardo Rodriguez s’étaient déjà illustrés en course automobile, la valeur n’attendant pas le nombre des années.

Opel-Manta-SR 1973- Course-de-côte-Saint-Germain-sur-Ille – Photo- Thierry-Le-Bras
La Manta première génération a connu l’adrénaline qu’offre la compétition. J’ai vu un modèle engagé en groupe 1 à la course de côte de Saint-Germain-sur-Ille en 1972. Elle manquait un peu de puissance dans cette discipline. Elle courut aussi en rallye. Beaucoup de pilotes lui préférèrent cependant sa sœur Ascona.

Fréquelin-Tilber – Opel-Manta-400 – 1985 – Critérium-de-Touraine- Photo-Thierry-Le-Bras
Par contre la Manta deuxième génération, présentée en 1975, mena une carrière riche et longue, surtout en groupe B dans les années 80. En rallye, elle était à l’aise comme un poisson dans l’eau. Parmi ses pilotes, je citerai notamment Henri Toivonen et Guy Fréquelin qui devint champion de France des rallyes à son volant en 1985.
Des Barracuda qui ne plaisantent pas
« J‘ai plus d’appétit, qu’un barracuda… », une phrase extraite d’un des titres les plus connus de Claude François qui sonne dans les oreilles de toutes les générations.

Chrysler-Barracuda – 2018 – Traversée-de-Rennes – Photo-Thierry-Le-Bras
La chanson d’Étienne Roda-Gil arrive en pleine époque disco. Mais le barracuda, grand poisson prédateur, effilé, rapide, aux dents effrayantes, n’a rien de festif vis-à-vis des proies qui croisent sa trajectoire. Il a donné son nom à une muscle car du groupe Chrysler, la Plymouth Barracuda. Un bolide très Rock’n’roll qui chassera sur les terres de la Ford Mustang, de la Pontiac Firewire et de la Chevrolet Camaro.

Christian-Avril – Chrysler-Barracuda – 1973 – CC-Saint-Germain-sur-Ille – Photo-Thierry-Le-Bras
Les Cuda évolueront au fil des années. Elles recevront plusieurs moteurs dont les plus puissants développeront 385 puis 425 chevaux. Des versions compétition seront développées. En 1973 par exemple, elles se révèleront redoutables en groupe 1 grâce à la puissance offerte par un moteur V8 de 7 litres. Le bruit rauque produit par l’engin faisait souffrir les tympans sur les tracés de courses de côtes. La Cuda exigeait un pilotage différent de celui des Opel Commodore GSE, BMW 30 CSI, Alfa Romeo 2000 GTV ou BMW 2002 tii. Pas question de prendre trop d’appui sur le train avant sous peine de très mauvaise surprise. Mais sur les tracés rapides la puissance faisait la différence et les victoires en tourisme de série furent nombreuses, contraignant les rivales européennes à chasser les premières places dans leurs classes de cylindrée.
Ces requins prêts à bouffer la concurrence
« La F1, c’est … comment dire, un parc de requins », avait témoigné Nico Rosberg au début de sa carrière en F1. Rien d’étonnant donc à ce que les ingénieurs affublent leurs engins d’appendices aérodynamiques ou tout simplement de formes qui révèlent la vraie nature de leurs créations infernales. Nous observerons que la recette de l’aileron de requin sauce F1 et prototypes d’endurance ne ressort pas de la nouvelle cuisine automobile, loin s’en faut.

Jaguar-D – 2002 – Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
En 1954 déjà, les Jaguar Type D nées du coup de crayon de l’aérodynamicien Malcolm Sayer arboraient un superbe aileron vertical. Elles remportèrent les 24 heures du Mans en 1955, 1956 et 1957.

Von-Trips – Ferrari-156- 1961
Autre constructeur indissociable de l’histoire de la course, Ferrari. Un changement de règlementation à l’entrée des années 60 bouleverse les choix des constructeurs de F1. La cylindrée des moteurs baisse de 2,5 litres à 1,5 litre. L’installation en position centrale arrière succède aux moteurs avant. Ferrari exploite en 1961 et 1962 une nouvelle monoplace dénommée 156 F1 Sharknose, c’est-à-dire nez de requin. Parmi les pilotes 1961, Phil Hill, Wolfgang Von Trips, Richie Ginther, Ricardo Rodriguez (à partir de Monza), Giancarlo Baghetti et Olivier Gendebien. Les Ferrari Sharknose gagnent 5 Grands-Prix sur 8 lors de leur première saison. Phil Hill remporte le titre pilotes devant Wolfgang Von Trips. Ferrari devance largement de rivaux au classement des constructeurs. La Scuderia termine cependant la saison en deuil. Le comte Von Trips ayant trouvé la mort sur le circuit de Monza.

Ricardo-Rodriguez- Ferrari-156- 1961
La Ferrari au nez de requin connaîtra une saison 1962 plus difficile. Le climat s’est dégradé entre le Commendatore et des collaborateurs clés. Le châssis de la 156 va être dépassé par ceux des rivaux anglais. Le moteur ne suffira pas à conserver les couronnes.

Francis-Dosières- BMW-635-CSI – 1984 – Course-de-côte-du-Mont-Dore – Photo-Thierry-Le-Bras
Le coupé BMW E24 dessiné par Paul Bracq apparaît en 1976. Son programme, succéder à la BMW 30 CSi. Une tache lourde dans les années suivant la première crise pétrolière où les gouvernants stigmatisent la vitesse, la conduite sportive, la consommation d’énergie. En ce temps-là mes amis, les politiques ne juraient que par le diesel qu’ils entendent désormais bannir…

Francis-Dosières- BMW-635-CSI – 1985 – Course-de-côte-du-Mont-Dore – Photo-Thierry-Le-Bras
Le coupé série 6 fut souvent surnommé Sharknose à cause de sa ligne allongée et de sa face avant très méchante. Au plan commercial, ses cibles seront les Mercedes SLC, Porsche 928 et Jaguar XJS. En compétition, elle participera aux épreuves de voitures de tourisme, d’abord en groupe 2, puis surtout en groupe A. La version la plus puissante, la M635 équipée de la culasse 24 soupapes de la fabuleuse M1 ne sera pas homologuée car le nombre d’exemplaires produits n’atteindra pas le seuil minimum. La défense des couleurs BMW revient donc au modèle équipé d’une culasse 12 soupapes. Elle s’acquittera fort bien de sa mission en remportant de nombreuses victoires sur les circuits et tracés de courses de côtes. A titre d’exemple, Francis Dosières (photos ci-dessus) remporte le titre de Champion d’Europe de la montagne (catégorie 1) à son volant en 1985. La 635 sera poussée à la retraite deux ans plus tard par sa petite sœur, la M3. Même les grands requins blancs finissent par trouver plus rapide qu’eux. Ainsi va la course.
QUELQUES LIENS
DESIGNMOTEUR présente une digne héritière des Barracuda, la Dodge Challenger SRT Demon https://gotmdm.com/custom/2017/12/speedkore-dodge-demon-fibre-carbone/
Première course de côte en Opel Ascona SR http://circuitmortel.com/2016/03/premiere-course-de-cote-a-saint-germain-sur-ille-2/
Une autre Opel, la GT : dès le premier regard, j’ai senti le choc http://circuitmortel.com/2016/02/souvenirs-dopel-gt/
L’Opel GT, une voiture qui incarna bien des rêves de jeunesse http://polarssportsetlegendes.over-blog.com/2016/02/une-image-une-fiction-automobile.html
Dans cette BD sur les frères Pedro et Ricardo Rodriguez, vous retrouverez Ricardo su la Ferrari 156 F1 Sharknose (notamment lors d’une discussion avec le comte Wolfgang Von Trips) http://circuitmortel.com/2017/02/une-superbe-bd-sur-les-freres-rodriguez/
Thierry Le Bras