Sans Delorean, avec des Porsche après les Jaguar et en attendant les Ford GT40, Cobra, BMW, Alfa Romeo…
356, 904, 906, 907, 908, 910, 911, 917, 934, 924, 930, 936, 944, 956, 961, 962… La suite de chiffres vous dit quelque chose ? Ne cherchez pas dans les archives de l’épreuve de maths au bac. il s’agit simplement de quelques modèles Porsche qui ont animé les 24 Heures du mans au XXème siècle.

öveny-Roitmayer – Porsche-Carrera-RSR 2004 – Le-Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
Car la compétition fait partie des gènes de Porsche. Une identité si forte qu’elle a séduit deux des plus grandes stars qui se sont passionnées pour la course automobile, James Dean et Steve McQueen. Une image qui nous a tous conquis ou presque. Au moins ceux qui ont connu l’époque où des gentlemen drivers pouvaient rêver de participer aux 24 Heures. Or dans les années 60 et 70, quelles étaient les voitures les plus propices à la réalisation d’un tel dessein ? Les GT fabriquées par Porsche naturellement.
Quelques photos prises aux éditions 2002 et 2004 du Mans Classic évoquant la montée en puissance de Porsche dans la Sarthe.
Naissance d’un style de gagneuses
Le prototype 906 qui apparaît en 1966 succède à la 904. Le dessin de cette voiture résulte d’un important travail en soufflerie. Ferdinand Piëch et son équipe la conçurent en 35 jours ! La couleur blanche remplace le gris métallisé qu’affichaient les Porsche officielles auparavant. Il s’agissait de souligner la pureté du design, un style que nous retrouverons sur plusieurs générations de Porsche, notamment les 908 fermées et les 917.

ocher-Crubile – Porsche-906 – 2004 – Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
La 906 connut un grand succès en compétition. D’entrée, elle se révéla fiable et rapide. Dès sa première sortie aux 24 Heures de Daytona 1967, l’équipage Hans Hermann – Herbert Linge se classé en 6ème position au général. Puis au Mans, les trois voitures classées immédiatement derrière les trois Ford MKII furent des 906. Elles étaient pilotées par les équipages Siffert – Davis, Hermann – Linge et Schütz – De Klerk. N’oublions pas qu’elles étaient équipées de moteurs 2 litres, alors que les Ford couraient avec des V8 de 7 litres. Le 6 cylindres Porsche développé par Metzger atteignait tout de même 225 cv, une belle performance à l’époque. D’autant que la 906 n’accusait que 600 kilos sur la balance.

Fellner-Lechler – Porsche-906 – 2004 – Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
Lors d’un essai de la 906 effectué pour le magazine Automobile Historique (avril 2004), Sébastien Dulac témoigne de ses impressions au volant du petit bolide. « Monter à bord de la 906 est en soi une épreuve délicate pour laquelle les contorsions du pilote sont de rigueur. La voiture, dont le haut du toit culmine à 98 cm seulement du sol, réclame au pilote de se coucher en s’introduisant par la porte papillon. Après avoir posé son fondement dans le baquet, aussi minimaliste que le reste de l’intérieur car nous sommes dans une voiture de compétition où la recherche de perte de poids est une obsession. Première surprise, le point de vue du pilote ne s’imagine pas de l’extérieur. Les roues avant forment de chaque côté les coteaux d’un vallon qui descendrait au plus bas sur la pointe des pieds. Le concept fait penser clairement à celui d’une monoplace. » Plus loin dans l’essai, le journaliste soulignera l’excellent comportement d’une voiture qui ne partait pas facilement en travers. « L’outil est efficace, la machine éblouissante d’efficacité et de performance. »
La N° 9 ci-dessus fut une voiture d’essai et d’usine. Quant à la N° 19, elle participa aux 24 Heures 1968 avec au volant Christian Poirot et Pierre Maublanc. Elle quitta la course à la 19ème heure, disqualifiée pour ne pas s’être arrêtée au stand après une sortie dans un échappatoire.
L’icône 911
Un symbole Porsche en GT puisque le design des machines qu’engage la firme de Stuttgart aujourd’hui encore reste fortement inspiré du modèle dévoilé en 1964.

Porsche-911- 2004 – Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
Mes premiers souvenirs marquants de Porsche 911 au Mans remontent aux victoires de catégorie de Jean-Pierre Gaban en 1968 et 1969. En 1968, le pilote belge était associé à Roger Van Der Schrik et en 1969 à Yves Deprez. A dire vrai, la 911 s’était déjà illustrée les deux années précédentes dans sa catégorie des moins de 2 litres avec les équipages Rewes – Kerguen et Buchet – Linge.

Porsche-Carrera-RS – 2002 – Le-Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras

Porsche-Carrera-RSR 2004 – Le-Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
D’année en année, les évolutions des 911 sont devenues de plus en plus puissantes. Les modèles RS et RSR se musclant en cylindrée, l’aérodynamique et les appuis ont suivi. Des ailerons, des spoilers, des ailes plus larges…

Gadal-Laloge-Lebeuve – Porsche-911-RS-Gr-4 – 2004 – Le-Mans-Classic – phot-Thierry-Le-Bras
1976 sonna comme une révolution dans L’univers Porsche. La 934 arrivait. Une version turbo de 500 chevaux. La fin des atmosphériques ? Non, pas encore, car d’irréductibles amateurs bretons résistaient encore et toujours à l’envahisseur turbo. Alain Gadal, le frère d’une des pilotes de la GT victorieuse cette année-là, a engagé au Mans Classic une auto du même modèle. Une très belle initiative que les Bretons saluent comme il se doit !
Coup de cœur pour la914/6
Il existe des voitures surdouées qui passent auprès d’une grande carrière sportive. Tel fut le cas de la Porsche 914/6. Au début des seventies, Porsche s’interrogea sur son avenir en compétition. L’exemplaire piloté par Guy Chasseuil et Claude Ballot-Léna avait terminé sixième au scratch et gagné en GT aux 24 Heures du Mans lors de l’édition 1970 perturbée par la pluie. Pas mal pour une voiture équipée d’un petit moteur de 220 cv ! Dans des conditions difficiles, la 914/6 avait supplanté les 911 S et les Corvette qui n’appréciaient guère l’adhérence précaire. Le Marathon de la route la même année consacra la petite nouvelle. Au bout des 86 heures de l’épreuve disputée sur le grand circuit du Nürburgring, les trois 914/6 engagées occupaient tout simplement les trois premières places.

orsche-914-6 – 2002 – Le-Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
La 914/6 ne connut pas un succès énorme auprès de la clientèle. Trop carrée, trop différente du style 911, et standing cassé par l’existence d’une version 2 litres d’origine Volkswagen, tels furent les principaux handicaps de la 914/6. La clientèle traditionnelle Porsche redouta de se faire assimiler à de vulgaires utilisateurs de la populaire « VolksPorsche ». Quand on y réfléchit pourtant, la 914/6 adoptait avec plusieurs années d’avance la structure de la Stratos qui domina longtemps les rallyes mondiaux : une GT à moteur central, construite en fonction d’un équilibre des masses idéal. Porsche a-t-il raté l’occasion de développer l’arme absolue dans la discipline ? J’en suis assez convaincu. A défaut d’avoir construit le palmarès qu’elles méritaient, les 914/6 font désormais le bonheur des pilotes de véhicules historiques, notamment au Mans Classic.
908 et 917, les reines de la piste
La 908 fut déclinée en plusieurs versions. Spyder 908/2, spyder 908/3 (version courtes pour des épreuves très sinueuses telles que la Targa Florio ou le Nürburgring), carrosseries longues adaptées aux vitesses de pointe élevées, notamment sur les Hunaudières…

orsche-908-modèle-1969 – 2004 – Mans-Classic – Photo-Thierry Le Bras
Favorite des 24 Heures du Mans 1968, le proto 908 3 litres y connut un revers cinglant. Au début de la course, quatre 908 menaient la danse. Mais au fil des heures, elles furent ralenties par des problèmes mécaniques. Trois abandonnèrent. La seule à franchir le drapeau à damiers était devancée par une Ford GT40 et une Porsche 907/8 2,2 litres. Une déception qui contribua à la décision de lancer le programme 917. En 1969, la meilleure 908, celle de Larrousse – Hermann, perdit la course dans le dernier tour, battue par une Ford GT40 engagée par John Wyer. La N° 48 ci-dessus reprend la présentation exacte de la version avec laquelle Peter Revson et Steve McQueen se classèrent seconds aux 12 Heures de Sebring 1970. La voiture fut ensuite utilisée pour le tournage de scènes du film Le Mans au mois de juin suivant. Steve McQueen la pilota-t-il dans la Sarthe malgré l’opposition des compagnies d’assurances ? Son fils a affirmé ne pas le savoir lors de la sortie du documentaire The Man & Le Mans : http://circuitmortel.com/2015/11/steve-mcqueen-lhomme-et-le-mans/ . Un témoin a rapporté récemment en être convaincu. Nous recherchons des informations et reviendrons sur cette question.

Rahal-Redman – Porsche-917 – 2002 – Le-Mans-Classic – Photo-Thierry-Le-Bras
La 917 allait relever l’affront en 1970 et 1971. Pas avec les machines attendues d’ailleurs. Les versions longues étudiées pour flirter avec les 400 kilomètres/heures dans les Hunaudières laisseraient la victoire à des versions courtes. Pour moi, la 917 figure parmi les voitures de course les plus fabuleuses de tous les temps. Sans doute ne suis-je pas objectif car des pilotes parmi mes préférés la pilotaient quand j’étais adolescent, à commencer par Pedro Rodriguez, Gérard Larrousse, Leo Kinnunen, Vic Elford… Des géants, une machine fascinante, une époque où tout paraissait possible… Surtout pas pour Porsche ou avec une Porsche. Au Mans 1971, 33 des 49 voitures au départ défendaient les couleurs de la marque allemande.
A suivre…
QUELQUES LIENS
DESIGNMOTEUR présente des photos du Mans 2016 http://www.designmoteur.com/2016/07/photos-lemans24-nuit-circuit-lmp1-lmp2-gte/
1969, l’annonce d’un passage de relais entre la 908 et la 917 http://bit.ly/1TidL9Q
Des amateurs bretons vainqueurs au Mans sur Porsche groupe 4 qui roulait d’habitude en côte et en rallye http://bit.ly/1RxITRF
1976 : première participation de Didier Pironi aux 24 Heures du Mans sur une Porsche 934 Kremer http://bit.ly/21qHK0D
Une Porsche à l’honneur dans ce roman automobile http://bit.ly/29fHooI
Thierry Le Bras