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1976 : Didier Pironi découvre Le Mans au volant d’une Porsche 934 !

Didier nous a enthousiasmés tout au long de sa carrière. Contrairement à la plupart des pilotes contemporains, il n’hésita pas à courir dans d’autres catégories que la monoplace. Il y a 40 ans, en 1976, il découvrait les 24 Heures du Mans au volant d’une Porsche 934.

Didier Pironi a 24 ans. C’est un sportif accompli qui a pratiqué l’athlétisme, la natation et le judo. Il a découvert le sport automobile avec son demi-frère José Dolhem, de six ans son aîné, avec qui il s’entend à merveille. Didier a suivi José sur les circuits dès son enfance. Il y a côtoyé les plus grands, comme Jim Clark.

Pilote Elf

Didier veut devenir pilote. En 1972, il remporte le volant Elf. Il devient Champion de France de Formule Renault en 1974. Deux ans plus tard, il domine le Challenge européen de la discipline. Le week-end précédant les 24 Heures, il enlève sa sixième victoire de la saison sur huit courses disputées.

Tyrrell - Pironi - Stewart - au-Volant-Elf-1972

Tyrrell – Pironi – Stewart – au-Volant-Elf-1972

Elf a loué une Porsche 934 à Kremer, un préparateur proche du constructeur germanique. Elle porte le numéro 65. Le pétrolier français engage deux pilotes qu’il soutient sur cette voiture, le jeune surdoué Didier Pironi, et Marie-Claude Beaumont qui oriente sa carrière vers les courses en circuit après s’être révélée en rallye. Le troisième volant revient à Bob Wollek, pilote habituel de l’écurie Kremer et pointure incontestée des épreuves d’endurance..

Une voiture surprenante

1976 marque l’avènement du turbocompresseur en endurance. Chez Porsche, le sigle 934 indique que la voiture est issue de la 930 Turbo et conçue pour le Groupe 4 (Grand Tourisme). Son moteur de 600 chevaux et sa boîte de vitesses à quatre rapports longs lui permettent d’atteindre 300 kilomètres heure.

Wollek-Pironi Beaumont - Porsche-934-Kremer - 1976 -Le-Mans - Photo-Thierry-Le-Bras

Wollek-Pironi Beaumont – Porsche-934-Kremer – 1976 -Le-Mans – Photo-Thierry-Le-Bras

Son poids d’homologation s’élève à 1.120 kilogrammes. Cette contrainte en fait une voiture luxueuse. Tous les accessoires livrés en série conservent leur place, y compris les glaces électriques. La voiture est simplement allégée de son siège arrière ainsi que des plaques d’insonorisation tandis qu’un lest amovible d’un poids équivalent est installé à l’avant afin d’améliorer la répartition des masses.

Un beau potentiel

La 934 surprend par sa brutalité et le temps de réponse du turbo, tant à l’accélération qu’à la décélération.

Pilote aussi intelligent qu’adroit, Didier s’adapte à sa monture et au circuit. « Je me suis vite aperçu qu’il s’agit d’une technique de pilotage assez spéciale », confie-t-il au terme de la première séance d’essais au cours de laquelle il a réalisé un temps voisin de celui de Bob Wollek. « Il faut sacrifier le sprint à l’endurance et ménager la voiture si l’on veut terminer la course. La différence fondamentale avec la monoplace, c’est qu’il faut adapter sa conduite à la voiture, alors qu’en monoplace, on essaie d’adapter la voiture à son style de conduite. »

La Porsche numéro 65 s’élance en 20ème position sur la grille de départ. Elle occupe la 2éme place du Groupe 4.

Pironi-Wollek- Beaumont - Porsche-934-Kremer - 1976 -Le-Mans - Photo-Thierry-Le-Bras

Pironi-Wollek- Beaumont – Porsche-934-Kremer – 1976 -Le-Mans – Photo-Thierry-Le-Bras

Bob Wollek et Didier Pironi adoptent un rythme raisonnable de 4’11’’ à 4’15’’ au tour, légèrement plus rapide que celui de leur équipière. « A cette vitesse-là, nous pouvions rouler le coude sur la portière en regardant les filles dans les tribunes », plaisantera Bob Wollek. Tant qu’il fait jour, les pilotes se relaient à chaque ravitaillement, soit toutes les 50 minutes car la 934 consomme 60 litres à l’heure. Lorsque la nuit tombe, chacun aligne deux relais à suivre.

Maudit embrayage

La 934 progresse dans le classement. A 23 heures, elle pointe à la 14éme place. Mais la nuit mancelle commence son œuvre dévastatrice.

A 3 heures 34, Didier s’arrête, en panne d’embrayage. Le changement du mécanisme et de la butée nécessite une dépose de la mécanique. Si une telle intervention s’effectue en 20 minutes sur une 911 atmosphérique, la présence du turbo et le peu de place disponible pour travailler allongent considérablement le temps d’intervention. La voiture perd dix places.

Bob-Wollek - 1976 - Le-Mans

Bob-Wollek – 1976 – Le-Mans

Puis à 4 heures 43, c’est au tour de Bob Wollek de faire appel aux mécaniciens à cause de problèmes de tringlerie d’accélérateur.

A 8 heures 7, le sort frappe encore. Cette fois, il faut changer les amortisseurs.

La mécanique accorde une trêve. Didier, Bob et Marie-Claude remontent de la 22ème à la 17ème place.

Hélas, à 12 heures 30, une nouvelle déception les attend. Marie-Claude revient au stand. La butée d’embrayage a lâché.

Retombée à la 24ème place, la Porsche numéro 65 finira au 19ème rang, après avoir parcouru 3.863 kilomètres à une moyenne de 153,498 kilomètres heure. La Carrera atmosphérique des amateurs  bretons Segolen, Ouvière et Gadal s’impose en Groupe 4. Elle a tourné comme une horloge alors que toutes les 934 ont abandonné ou connu des ennuis mécaniques.

Didier-Pironi - Porsche-934-Kremer - 1976 -Le-Mans - Photo-Thierry-Le-Bras

Didier-Pironi – Porsche-934-Kremer – 1976 -Le-Mans – Photo-Thierry-Le-Bras

Didier se montre satisfait de cette première participation quoiqu’un peu déçu de ne pas avoir obtenu un meilleur résultat. La 934 qui deviendra bientôt l’arme absolue dans sa catégorie manque encore de fiabilité.

Occasions perdues

L’histoire de Didier Pironi et de Porsche se poursuivra par deux occasions manquées.

En 1979, Didier reçoit une offre de l’écurie allemande afin de piloter une 936 au Mans avec Jacky Ickx. Ken Tyrell, pour qui il court alors en F 1, oppose son veto.

Beaumont-Pironi-Wollek - Porsche-934-Kremer - 1976 -Le-Mans - Photo-Thierry-Le-Bras

Beaumont-Pironi-Wollek – Porsche-934-Kremer – 1976 -Le-Mans – Photo-Thierry-Le-Bras

En 1987, remis de son accident d’Hockenheim, Didier doit revenir en Grand Prix au volant d’une McLaren – Porsche. Hélas, des raisons étrangères à la volonté de Ron Dennis et du pilote français font obstacle à la concrétisation de l’accord.

QUELQUE LIENS

DESIGNMOTEUR a mis en plage un LiveTweet excellent permettant de suivre les 24 Heures du Mans en direct http://www.p1dm.com/lm24/

Didier Pironi au Tour de Corse 1975 http://bit.ly/1N3JPrm

La course automobile n’est pas toujours appréciée de la même manière par l’ensemble des membres de la famille http://circuitmortel.com/2016/02/chacun-sa-vie-chacun-sa-trajectoire/

Le roman d’une course de 24 Heures à Lohéac (un polar signé Thierry Le Bras) Rallycross http://bit.ly/1XEpx1J

Une image, une fiction automobile jeunesse   http://bit.ly/1WZbBep

Thierry Le Bras

3 Commentaires

  1. Bonjour,

    Merci pour cet article.
    J’ai suivi la carrière de Didier Pironi, mais je n’était pas au courant, qu’il devait reprendre le volant d’une F1, McLaren – Porsche.
    Pouvez vous en dire plus (si vous le pouvez).
    Je pense qu’au départ, c’était pour un essai, était ce la F1 de Prost/johanson de 1987?
    Le retour de Pironi sur la Ligier avait été « compliqué » , qu’attendait’il de cet essai?
    Merci

  2. L’essai Ligier s’était plutôt bien passé à ma connaissance. « Je n’ai pas attaqué comme je l’aurais souhaité car je ne voulais pas risquer d’abimer le matériel aimablement prêté par Guy Ligier », regrettera Didier. Dans « La fureur de vivre » (Éditions JC Lattès – 1993), Loïc Sellin et Bertrand Tessier font état de temps sensiblement identiques à ceux de René Arnoux, alors pilote officiel Ligier.

    Quant à l’échec des négociations avec McLaren, Didier Pironi l’attribuait à une manœuvre sournoise d’Alain Prost. Il le mentionna lors d’une interview accordée pendant le tournoi de Roland Garros en juin 1987. « J’ai bien failli avoir cette année une McLaren. J’avais rencontré Alain Prost et il m’a confirmé qu’il était ravi de m’avoir à ses côtés. Et puis j’ai reçu un coup de téléphone embarrassé m’expliquant qu’Alain ne voulait pas prendre le risque de me faire avoir un autre accident… »

    Le 20 août 1987, Didier avait renégocié un contrat de Formule 1. Il allait entrer dans l’écurie de Gérard Larrousse. Nul doute que ce team F1 français aurait connu une autre trajectoire sans ce maudit accident du 23 août 1987.

  3. PS : Je pense que l’essai plus difficile avait été celui de l’AGS en 1986 au Paul Ricard. Mais cet essai n’était pas significatif. D’abord, c’était la première fois depuis 4 ans que Didier pilotait une F1 contemporaine. La séance avait été perturbée par des soucis moteur en permanence.

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